des polissons

Les évenements

actu

Ces femmes qui ont lutté contre la misogynie littéraire

Lorsque les anthologies étaient écrites par des hommes les auteures n’y avaient que peu de place. Pensons à cette affirmation du poète Barbey d’Aurevilly qui s’insurgeait contre celles qui prenaient la plume au XIXe siècle: « Les femmes qui écrivent ne sont plus des femmes ».

D’où vient cette misogynie littéraire ?

Cette idée que la femme ne puisse pas écrire a eu la peau dure pendant des siècles, trouvant ses racines dans les représentations traditionnelles qui font d’elle une reine du foyer mais également un être à l’intelligence défaillante. Les frères Goncourt auront même ce mot insultant : « Le génie est mâle ».

La femme est certes louée dans la littérature pour ses charmes et sa beauté mais son statut de muse ne lui confère pas le droit de prendre la plume à son tour, comme le dit Ponce-Denis Écouchard Le Brun (1729-1807) : « Inspirez mais n’écrivez pas ».

Et pourtant le désir leur a insufflé des pages torrides

Louise Labé (1524-1566) nous offre ces vers qui respirent la sensualité:

« Baise m’encor, rebaise moy et baise ;

Donne m’en un de tes plus amoureux (…)

Je t’en rendray quatre plus chaus que braise. »

 

Moins connue, Madeleine de Laubespine (1546-1596) est la dame d’honneur de Catherine de Médicis. Dans un sonnet qui s’intitule « Le Luth » elle nous invite à considérer d’un œil coquin cet instrument à cordes aux attributs phalliques:

Je prends le manche en main, je le tâte et manie / tant qu’il soit en état de me donner du plaisir / Sur mon lit je me jette, et, sans m’en dessaisir / Je l’étreins de mes bras et sur moi je l’appuie / Et, remuant bien fort, d’aise toute ravie, / Entre mille douceurs j’accomplis mon désir. »

Michelangelo Merisi, dit Caravage, Le Joueur de luth, 1595-1596 (détail)

 

Mais certaines ont écrit des textes licencieux sous pseudonyme masculin pour s’imposer

George Sand (1804-1876), garde de son amant Jules Sandeau son nom de plume et relègue aux oubliettes le patronyme d’Aurore Dupin.

George Sand par A. Charpentier (1838)

Elle choque la bonne société car elle fume, s’habille en homme, prend des amants et des maîtresses. Considérée comme une « femme perdue », Proudhon parle à propos d’elle « d’omnigamie ». Peu lui importe, elle compte parmi ses illustres conquêtes Frédéric Chopin et Alfred de Musset.

A ce dernier elle aurait envoyé une lettre cryptée, à lire une ligne sur deux:

Je suis très émue de vous dire que j’ai
bien compris l’autre soir que vous aviez
toujours une envie folle de me faire
danser. Je garde le souvenir de votre
baiser et je voudrais bien que ce soit
là une preuve que je puisse être aimée
par vous. Je suis prête à vous montrer mon
affection toute désintéressée et sans cal-
cul, et si vous voulez me voir aussi
vous dévoiler sans artifice mon âme
toute nue, venez me faire une visite.

(Extrait)

 

Colette, quant à elle, prend le nom de son beau-père mais auparavant elle écrit sa série des Claudine avec le prénom de son époux, « Willy ».

Colette vers 1890

Le succès lui permettra de sortir de l’ombre pour ravir ses lectrices de pages sulfureuses, comme ici dans L’ingénue Libertine: « Elle vit (…) faunesque et barbu, ce grand corps brun exhalant une odeur connue d’ambre et de bois brûlé ».

Pas si sages, les femmes en corsage…

 

 

Leave a reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *